L’interprétation du droit du travail par la jurisprudence peut soit accentuer la protection du salarié, soit au contraire l’amoindrir. La Cour a favorisé cette protection dans une affaire de harcèlement sexuel.
Cass. Soc. 25 mars 2020
La notion de harcèlement sexuel est partagée entre deux juges : le juge pénal et le juge civil.
Les règles qui s’imposent à chacun d’eux ne sont pas les mêmes et emportent une appréciation différente de la notion de harcèlement sexuel.
a) Selon le juge pénal :
Le Juge pénal appréciera la notion de harcèlement sexuel selon les principes du droit pénal et notamment :
- L’interprétation strict du droit pénal (article 111-4 du code pénal)
- Le délit est une infraction intentionnelle sauf si la loi en dispose autrement (article 121-3 du code pénal)
b) Selon le juge civil :
Le Conseil des Prud’hommes est soumis à la procédure civile. Or, en droit civil, l’interprétation d’un texte est possible par le juge dès lors où l’interprétation qui en est faite tend à mettre en application l’esprit de la loi.
Ainsi, selon le juge saisi, l’appréciation de cette notion de harcèlement sexuel sera différente.
La position de la Cour de cassation :
La Cour de Cassation, dans son arrêt en date du 25 mars 2020, illustre cette différence entre le juge pénal et le juge civil.
a) Les faits de l’espèce :
Dans l’affaire qui a été soumise à la Cour de cassation, il s’agissait d’une salariée engagée en qualité d’assistante dentaire le 12 juillet 2012 aux termes d’un contrat de professionnalisation.
Le 25 octobre 2013, la salariée a été licenciée pour faute grave.
Invoquant un harcèlement sexuel de la part de son employeur, elle conteste son licenciement devant le Conseil des Prud’hommes.
Parallèlement, une procédure pénale avait été engagée et l’employeur était poursuivi pour les faits de harcèlement sexuel. Mais le Tribunal Correctionnel a relaxé l’employeur des faits de harcèlement sexuel, considérant que l’élément intentionnel du délit n’était pas caractérisé.
Sur le plan prud’homal, le juge a annulé le licenciement de la salariée retenant qu’elle avait été victime de faits de harcèlement sexuel.
b) La décision de la Cour de Cassation
L’employeur a intenté un pourvoi en cassation.
La Cour de Cassation a rendu l’arrêt du 25 mars 2020, publié au bulletin et dans lequel elle retient « c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que la décision du juge pénal, qui s'est borné à constater l'absence d'élément intentionnel, ne privait pas le juge civil de la possibilité de caractériser des faits de harcèlement sexuel de la part de l'employeur »
Deux définitions différentes du harcèlement moral :
Ainsi, la Cour de cassation retient deux définitions différentes du harcèlement moral en fonction de la juridiction saisie :
- En droit pénal, le harcèlement sexuel est un délit et le juge pénal doit caractériser l’existence de l’élément intentionnel de son auteur.
- En droit du travail, la Cour de cassation considère en revanche que le juge prud’homal n’a pas à caractériser l’élément intentionnel du délit pour annuler le licenciement.
En cela, la Cour rejoint l’interprétation qu’elle avait donné également du harcèlement moral issu de l’article 1152-1 du code du travail pour lequel elle considère qu’il n’est pas utile de relever l’existence d’une intention de nuire.
Si vous pensez subir des faits de harcèlement que ce soit moral ou sexuel, vous pouvez prendre contact avec le Cabinet d’Avocat de Maître Delphine ROBINE qui vous accompagnera dans toutes les démarches judiciaires.
Ajouter un commentaire
Commentaires